Je suis là, dans mon salon que vous n'avez jamais vu, une tasse de thé fumante sur la table basse. Ma playlist passe Sigur Ros pendant de longues minutes... Une ambiance islandaise, quelle coïncidence... Dehors il pleut, le ciel est très sombre. Je suis debout face à la fenêtre, les bras croisés, à moitié nue, juste un grand pull qui m'arrive pile sous les fesses, des manches trop grandes, les jambes nues, les fesses dans un petit shorty en dentelle et des chaussettes qui remontent sur mes chevilles, je ressens le froid de dehors contre la vitre. Il me manque quelque chose, quelqu'un. Ce moment de nostalgie, cette lourdeur que je ressens, j'aimerais être deux à cet instant.
Oui c'est vrai, j'ai eu envie de ce moment avec d'autres, mais très peu d'autres pour être honnête, essentiellement celui dont je vous ai souvent parlé et que je ne mentionnerais pas ici une énième fois, il me faut l'oublier d'une certaine façon, vous me l'avez répété encore il y a quelques jours au téléphone. Mais depuis quelques semaines, malgré de nouvelles rencontres, de nouveaux amants célibataires, une sélection faite parmi les anciens infidèles, de nombreuses questions et d'incertitudes, j'ai une envie, de plus en plus forte. Une envie de câlins. De vos câlins. Non je ne transferts pas, non je ne transpose pas un sentiment d'une personne à l'autre, ce n'est pas comparable vous le savez, mais j'ai vu autre chose en vous qui me donne ce désir, ce moment. Une envie d'être dans vos bras un instant, comme si j'étais votre Madame, comme si nous partagions un moment de couple, un moment où les coeurs sont lourds sans vraiment savoir pourquoi, un moment où le seul remède reste de se caler dans les bras de l'autre, sentir les vôtres s'enrouler autour de ma taille, vos lèvres dans mon cou, votre corps collé au mien, regardant par la fenêtre aussi avec moi les gens qui courent s'abriter dans la rue sous les gouttes d'eau et sourire doucement. Voir tout cela dégouliner le long de la vitre et entendre votre soupir au creux de mes oreilles, comme si vous aviez trouvé votre place en un instant contre moi, contre ma chaleur. Parce que je sais que VOUS sauriez partager ce moment là comme je l'espère, comme je le ressens, comme je le vis en l'écrivant. Parce que là dessus, nous nous comprenons profondément. Parce que cette soirée serait si belle de complicité.
Nous pourrions aussi être sous une légère pluie, sur la plage de Deauville face à la mer comme dirait l'autre, un ciel tout aussi sombre, une mer un peu agitée, seuls au monde, dans la même position, les pieds dans le sable. Cette envie de hurler, de pleurer peut-être, de réfléchir ou au contraire de ne penser à rien. C'est si dur de ne penser à rien n'est-ce pas ? Ce spleen intense qui veut être partagé en silence. Ce besoin que vous et moi avons de souffrir à l'intérieur ou portés par les mots et une musique en fond sonore. Et si "Amazing Grace" aux bagpipes se jouait au loin sur cette plage brumeuse ? Les larmes montraient, comme pour nous libérer, mais ce serait si bon. Ensemble. Une ambiance chocolat chaud, un cocon. Une poitrine qui a besoin de s'alléger un instant juste vous et moi, comme une solution, comme une étreinte rédemptrice. Un baiser scellé aussi peut-être. Un appel à la suite, à un repas sous les éclats de rire, les fourchettes échangées, à une balade innocente bras dessous bras dessous ou main dans la main, d'autres câlins assis sur le bord de la plage, sur un fauteuil moi calée entre vos jambes, des caresses, ne pas se poser de questions, juste vivre le moment. L'attirance serait sentimentale, intellectuelle, physique aussi peut-être, sûrement.
Là maintenant, je me moque de savoir que vous n'êtes pas à moi, que vous êtes à une autre officielle. Je me moque de l'image nostalgique que cette révélation, ce texte, donne de moi, la maîtresse habituellement frivole, créative et espiègle, qui s'affiche désormais à masque découvert comme une femme qui souhaite cruellement partager des moments de vie comme les autres de temps en temps, comme si elle était considérée comme humaine et pas seulement femme de corps. Je me moque de savoir si le nom de notre relation est "amis", "futurs amants", "connaissances virtuelles" ou "amoureux des Blues Brothers". Je n'ai jamais aimé les carcans, et je ne cherche pas à ce que ça soit réel ou non, je partage une envie, un fantasme sans rien de sexuel dedans... enfin pour l'instant qui sait ;-)
Une envie d'adolescente romantique qui a longtemps espéré une scène de cinéma telle que celle là.
Une envie d'amante en mal de tendresse simple sans concession.
Une envie de maîtresse en mal de sincérité.
Une envie de femme souvent trop perdue ces derniers temps, qui éprouve un besoin de ressentir quelque chose de réel et de partagé, autre qu'un orgasme physique.
On me demande souvent si je ne souhaite pas être en couple "comme tout le monde" ou si je me complais à fréquenter des hommes mariés ou des amants célibataires occasionnels. Vous le savez, il est si difficile de leur répondre que j'ai envie et besoin de ce qu'offre les deux car pour l'instant je n'ai connu que très peu d'hommes qui m'aient comblées sur ces deux points en même temps. Voire même concrètement aucun, même si l'un d'entre eux s'est dangereusement rapproché de ce que j'espérais.
Est-ce si mal de vouloir ce genre de moment avec quelqu'un qui le vit exactement comme je le ressens ? Je vous attends.
Très sincèrement,
Moi.